Si vous suivez le compte à rebours enclenché avant les fêtes de Noël, il ne vous aura pas échappé que nous arrivons non seulement au terme de notre périple bordelais, mais aussi à la fin de notre tournée des finalistes du Prix 2016. C’est donc d’un ton très solennel que je déclare ouvert l’avant-dernier J’irai filmer chez vous, consacré à Be Quiet, un groupe en pleine croissance et qui aime le rock… et le lait.



ichor
MIAM. Extrait de « Ichor »

Dans le dernier épisode, nous nous sommes quittés juste après la rencontre avec I Am Stramgram, rencontré le matin même au Rocher de Palmer. Là, vous vous dites certainement que tout s’est enchaîné très vite, que nous avons grillé 10 feux rouge, écrasé trois pervenches et gobé un œuf cru au passage pour être à l’heure avec notre rendez-vous de l’après-midi, à savoir les gamins de Be Quiet (20 ans de moyenne d’âge). Bon, tout faux. Exceptionnellement, et grâce à la mobilisation de nos forces syndicales réclamant un temps de repos légal (plus de 10 minutes) et une vraie pause déjeuner (autre chose qu’un Mc Beurk), nous voici attablés à quelques mètres du lieu de rendez-vous, dans la friche Darwin.

Sur le papier, ça claque. En vrai, il s’agit d’une friche réinvestie par la jeunesse branchée de Bordeaux, où un skate park cohabite avec un resto « 85% local / 95%bio », une aire de repos pour graphistes exténués et où chaque trentenaire semble tout droit sorti d’un défilé de mode pour American Apparel. Face à tout ce remue-ménage de barbes bien taillés, on fait comme Be Quiet, on reste tranquille. L’occasion pour Romain (notre ingénieur du son / maitre zen / pêcheur) d’un petit cours sur la pêche éthique : « le vrai sens de la pêche, c’est la quête du poisson mystérieux ». Ok, ça calme. Et voici qu’il nous sert certainement ce qui restera la punchline de la semaine : « Many men go fishing all of their lives without knowing that it is not fish they are after ». En clair dans le texte : « Les Hommes pêchent parfois toute leur vie sans vraiment savoir après quel poisson ils courent ». Bon, c’est du Henry David Thoreau, un poète américain. C’est le genre de citations qui vous remet le cerveau en place. Et ce ne sont pas les hipsters à doudoune sans manches qui promènent leurs enfants en poussette McLaren qui diront le contraire.

Tant qu’à rester sur la métaphore aquatique, voici un autre proverbe qui va bien au Prix Ricard S.A Live Music : « Poisson raté semble gros ». Bah oui. Après presque 2 semaines de tournée et presque 10 finalistes rencontrés, comment être sûr qu’on ne ratera pas le bon lauréat ? C’est sur cette interrogation que nous sommes prévenus par le groupe qu’ils sont déjà installés dans la galerie voisine. Le groupe, c’est donc Be Quiet. Un projet né voilà déjà 4 ans, alors que les potes sont encore au lycée. Nous voilà donc face à un vieux groupe de jeunes… dont l’un des membres a la particularité d’être à la fois bassiste et étudiant en maths. D’ailleurs le voilà qui arrive, à la bourre, il sort tout juste d’un exam, et s’excuse du retard. L’occasion d’un rapide – et vicieux – blind test :

– 7X9 ? – Euh… 56 ? – 8 X 5 ?
– … 45 ?

Bon, c’est mal barré pour le Prix Nobel de calcul mental, mais reste encore la musique. Alors que le groupe s’installe dans la galerie d’art, on leur demande pourquoi le lait (oui, le lait) semble être plus grande influence, comme on peut le remarquer dans leur dernier clip. « Parce que c’est notre carburant depuis le début ». Ils ont l’air sérieux en plus. Et l’un des membres de rajouter, en pointant la mini-voiture sur laquelle ils sont assis :. « Tu crois qu’on est arrivé comment ici ? ». OK, ces mecs sont carrément frappés. « Le meilleur lait, c’est le Matin Léger. Et aussi le lait d’amande ». Carrément innarrêtables sur le sujet laiteux, le groupe possède aussi un avis sur la scène bordelaise, hyper concurrentielle. « On ne voit pas ça comme une menace, mais plutôt comme une opportunité. La preuve, c’est que notre projet est né de la fusion de deux groupes ». Voici des gamins qui ont du plomb dans la tête et pas dans les ailes.

Alors que je m’interroge sur l’étonnante ressemblance du guitariste avec Damon Albarn, le chanteur lâche la phrase qui tue : « Bon allez, on n’est pas là pour faire du Radiohead ». C’est vrai que Carcosa n’a rien à voir avec les suppliques du chanteur épileptique. Une fois la session mise en boite, nous déprimons un peu. Non seulement c’est la fin de nos sessions bordelaises, mais surtout il faut encore prendre la route sur Paris, où le dernier finaliste (Minors) nous attend dès le lendemain matin. Six cent kilomètres, une arrivée à minuit et un tournage à deux pas de chez Manuel Valls à Matignon, c’est ce qui vous attend demain pour le récit de notre dernière journée sur la route. La quête du poisson mystérieux continue !

 

 

 

 

 

 


TROIS QUESTIONS EXPRESS À BE QUIET


Quelles sont les raisons qui vous ont donné envie de participer au Prix Ricard S.A. Live Music ?

Le groupe : Parce qu’on trouve que c’est un super dispositif qui permet au lauréat d’être accompagné avec le Chantier des Francos, les tournées, la promo… Et rien que pour les finalistes c’est génial pour la mise en avant…

N’en faites pas trop non plus…

Le groupe : Ah ah ah. Ce qui est drôle c’est qu’on a déjà joué avec deux anciens lauréats, Fuzeta et Two Bunnies in Love ; on a donc déjà eu l’occasion de les écouter. Et puis on a écouté tous les finalistes, où il y a effectivement pas mal de groupes bordelais.

Pour finir, une question examen : quel est votre argument choc pour convaincre le jury que Be Quiet DOIT gagner ?
Le groupe : Parce qu’on fait de la musique électronique avec une formation rock et parce qu’on ne se prend pas trop au sérieux. Avant on était plutôt dans une ambiance limite morbide, tous fringués en noir, avec des inspirations un peu goth ; puis on s’est rendu compte que c’était chiant et que finalement on préférait faire de grosses blagues dégueulasses. On a donc arrêté de se prendre au sérieux et on a appelé notre EP « Balek », ça veut tout dire non ?

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Photo : Rod Maurice