Après plus de 1140 inscriptions de groupes et des dizaines de milliers de vote, après plusieurs nuits blanches pour tout écouter, après 3000km parcourus en dix jours et presque autant de McDonalds ingérés dans des temps records, après des dizaines de photos humiliantes des membres du jury prises par un autre membre du jury, bref, après cette longue introduction façon Des chiffres et des lettres, le compte est bon : nous sommes fiers de pouvoir enfin vous annoncer le nom de l’heureux lauréat du Prix Ricard S.A. Live Music 2015 … les Two Bunnies in Love !

Mince, je me trompe, ça c’était les gagnants de l’édition 2014. Faut me pardonner, c’est la fatigue. Car cette année, pas plus que les précédentes, ça n’a pas été de tout repos. En moins de trois semaines, nous avons dû écouter les 100 groupes les plus plébiscités par le public (95% de plaisir, 5% de souffrance), délibérer lors d’une séance mouvementée pour élire les 10 finalistes, faire nos valises en quittant femmes, lapins et enfants, charger notre van façon Agences Tous Risques, supporter les sautes d’humeur genre Sheldon Cooper du réalisateur Rod ‘’j’ai plein de théories’’ Maurice et accessoirement trimbaler la cinquantaine de kilos de matériel nécessaire à l’enregistrement de chaque session aux quatre coins de la France, de Bordeaux à Paris en passant par… Bordeaux et Paris (NB pour nos lecteurs adeptes de théories du complot : cette année beaucoup de finalistes venaient de Bordeaux et Paris. Coïncidence ? Je ne crois pas).

Fuzeta est le lauréat du Prix Ricard S.A Live Music - Photo : Rod Maurice

Que disait-on déjà ? Ah oui, F U Z E T A. Un groupe venu du Morbihan qui, comme avec les Two Bunnies in Love l’an passé, s’est imposé dans la dernière ligne droite, alors que nous avions déjà rencontré les 9 autres finalistes et commencé à monter notre podium. Un groupe de frères aussi, emmené par les frères Sims, que nous avons découverts un lundi après-midi après qu’ils aient donné un concert époustouflant pour des enfants à l’Ubu de Rennes, et qui nous confia, avec la plus belle honnêteté qui soit, qu’il leur avait fallu du temps pour oublier les postures et troquer leurs guitares bruyantes contre « des grattes pourries à 100 balles », avec le souci de se foutre à poil devant leur public (et pas devant des enfants, vous l’aurez compris). Si les tournages sur cette finale nous ont conforté dans l’incroyable qualité des 10 candidats retenus, c’est bien la session de F U Z E T A qui nous a donné envie de lever le pouce – et tout le reste – pour croire en eux.

Face à tant de spontanéité, et conquis par un songwriting épuré et americanesque (en gros : entre Grizzly Bear et Sparklehorse), le jury n’a pas hésité longtemps avant de faire des frères Sims leur nouveau lauréat. Comme d’autres avant eux, les membres de Fuzeta auront cette année la chance de bénéficier d’un dispositif d’accompagnement véritablement unique en France, d’une tournée à la présence sur les festivals d’été en passant par – c’est une nouveauté – le financement de leur premier EP. Et si les frères Sims ont une panne d’inspiration pour l’écriture des paroles, on pourra toujours leur proposer quelques anecdotes de la tournée pour remplir leur carnet :

  • comment perdre son salaire en trois parties de ping pong contre le boss du Prix après une session avec Monterosso (j’ai testé),
  • comment rejouer L’Age de glace pendant 5h d’affilée dans une église pas chauffée avec Balinger,
  • comment réhabiliter le sax avec Bloum, comment lutter contre l’addiction fatigante de Rod Maurice pour les jeux vidéos (32kg de cartouches amassées en une semaine…),
  • comment tomber sur le pire restau-gras de Toulouse avant une session épileptique avec I Me Mine,
  • comment se retrouver à discuter physique quantique et mélodies venues du cosmos avec un groupe de post-punk grâce à Pink Noise Party,
  • comment se retrouver dans un porno de série Z avec le clavier de Jérémie Whistler; surnommé « Sylvano la moustache ». De quoi imaginer des films aussi tordus que Harry peloteur et la croupe de feu ou L’arrière-train sifflera trois fois
  • comment se retrouver à tourner une session avec Parc dans une pièce de la taille d’une chambre de bonne, façon Beth Ditto coincé dans un ascenseur pour une personne…
  • comment faire des blagues pourries sur Poitiers et le Futuroscope sur la route direction Bordeaux pour une session avec Banquise,
  • comment intoxiquer Adrien Marchand et Rod Maurice, furieusement allergiques à la nicotine, dans la cave enfumée des bordelais de Cliché (leur faudra 24H pour s’en remettre, petites choses),
  • Et surtout, surtout, prix d’honneur du jury sur cette édition : comment se retrouver parmi les dix finalistes quand on n’y a pas été invité avec Skully Circus, un groupe tellement fan du Prix Ricard S.A. Live Music qu’il a décidé de nous parodier grâce à une session que les membres ont réalisé eux-mêmes, sans oublier d’écrire un compte-rendu à la manière de Bester (et c’était pas mal écrit je dois dire).
La team RLM vous dit a l'année prochaine !
La team RLM vous dit a l’année prochaine !

Bon. Pour citer le poète Jean-Louis Aubert, « voilà c’est fini ». Allongé sur mon lit d’hôpital où j’ai décidé d’entamer une cure de sommeil, et alors que je finis de répondre aux quelques lettres d’amour de nos lecteurs suite à l’écriture du papier Comment reconnaître un mauvais groupe en 30 secondes, c’est ainsi que se conclue cette nouvelle tournée des finalistes du Prix. Comme chaque année, on verse une larme en pensant qu’il faudra attendre un an pour remettre ça. Un an, c’est aussi le temps dont disposeront les Bretons de F U Z E T A pour exploser sur scène et sur disque grâce au dispositif du Prix. On leur souhaite, contrairement à Sinsemillia, tout le bonheur du monde !