Les cinq conseils de Bester pour écrire sa bio !

Tuto

Le Prix Ricard S.A. Live Music, chaque année c’est un peu comme une courses de spermatozoïdes : des centaines de participants, un seul vainqueur. Et un jury qui prend discrètement des notes pour vous aider à passer entre les mailles du filet. Après les 5 conseils de Bester pour remporter le Prix, notre journaliste vous livre aujourd’hui quelques trucs et astuces pour vous aider à écrire vous-même votre bio, parce que votre cousin-manager n’est pas Zola et que vous n’avez pas forcément un Philippe Manœuvre caché dans le placard.

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Si parler de soi n’est pas toujours évident – on va même dire qu’hormis Matthew Bellamy de Muse AUCUN musicien n’aime vraiment l’exercice du ma vie, mon œuvre – c’est malgré tout un passage obligé pour tous les groupes indépendants : la BIO-GRA-PHIE.
On ne va pas se mentir, c’est une tannée. Non seulement pour le membre du groupe qui a la lourde tâche de l’écrire, mais aussi parfois pour ceux qui la lisent. Plus ampoulée qu’un discours de Président, trop longue, trop courte, poétique comme une chanson de Yannick Noah… les pièges sont nombreux. La bio, ou plus communément ce qu’on appellera la « présentation du groupe », est pourtant une étape indispensable dans la carrière d’un artiste ; car c’est souvent le premier lien entre vous, les médias et vos fans. Voici le mode d’emploi des do’s and don’t pour un descriptif qui saura peut-être séduire les membres du jury du Prix Ricard S.A. Live Music. Evidemment, tous les conseils ne sont pas à suivre à la lettre…


1. Ce n’est pas une lettre de motivation


On sait que les temps sont durs et que la jeunesse française cherche du boulot, mais justement, depuis que vous avez compris qu’en tant que musicien vous ne ferez jamais fortune, autant laisser tomber les formules toutes faites genre « formé à Brive en 1992 le groupe Motherfuckers cherche à gagner des parts de marché sur le secteur du rock festif ». Les gens qui vous lisent – et surtout ces enfoirés de journalistes payés pour écouter des disques qu’ils jettent à la poubelle – ont sûrement déjà lu 5 ou 6 biographies avant d’arriver à la vôtre. Si vous ne postulez pour aucun boulot, sachez quand même vous faire désirer dès les premières lignes grâce à une punchline bien sentie genre « Les Mothersfuckers sont nés des entrailles de la haine et leur rock stoner n’a qu’un seul objectif : foutre une branlée au gros rouquin de Queen of The Stone Age ». Là encore, c’est un exemple…

 


2. Non au storytelling


On en arrive au deuxième point crucial pour votre biographie. Gamin, vous rêviez d’être Mick Jagger (ou Jean-Louis Aubert, auquel cas il vous faut consulter d’urgence), pas Jacques Séguela. Comme vous n’avez certainement pas les moyens de vous payer les services d’une grande agence de communication, évitez de rédiger votre bio comme une histoire de Walt Disney. Pour résumer : ne sur-vendez pas votre groupe à ceux qui ne le connaissent pas (encore). Vous avez galéré pour en arriver là ? Dites le. Votre batteur s’est inspiré de Phil Collins sur votre tube indie ? Dites le, c’est un angle d’attaque ! Vous n’avez jamais pu blairer Louise Attaque et c’est la raison même de l’existence de votre groupe ? Assumez le. Souvent les groupes qui débutent n’ont pas d’histoire et tiennent absolument à en créer une pour épater la galerie. C’est une erreur. Plutôt que de badigeonner des tartines sur du rien – vous avez 6 mois d’existence en tant que groupe, y’a pas de honte à ça – faites court et factuel.

 


3. Éviter d’écrire la pléiade


Comme d’autres professions, le journalisme est un travail tarifé. Les journalistes n’ont pas le temps de lire vos 6 pages de présentation, pas plus que le public d’ailleurs. Plus c’est long, moins c’est bon. Une bonne bio dit l’essentiel en 1 page ; quant au descriptif, comptez deux paragraphes pour accrocher le regard du lecteur. Et bien sûr, oubliez le coup du « je vais choisir une police 8 pour tout faire rentrer sur 1 page », on connaît la technique…

 


4. Trop de comparaisons tuent la comparaison


S’asseoir sur la notoriété de groupes connus pour rendre votre groupe légitime aux yeux du lecteur, c’est l’un des pièges à éviter quand on veut durer dans ce « métier ». Conséquence de quoi, empiler les noms d’artistes à la mode comme dans une partie de Jenga peut non seulement vous causer du tort, mais aussi laisser supposer que votre groupe n’a rien d’original. Laissez l’égo et votre discothèque au vestiaire, et surtout laissez la liberté à celui qui vous lit de se faire sa propre opinion. Si votre groupe est « à la croisée des chemins entre les mélodies d’AC/DC, la fureur d’Airbourne et le charisme de Calogero (?!) », ce n’est pas à vous de le dire. Ne spoilez pas la fin du film, quoi. Allez-y donc avec parcimonie sur les références : un groupe connu pour attirer l’œil du public, un autre plus confidentiel pour épater les médias. Et basta.

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5. Trouvez les mots justes (et passez les mauvais au lance flamme)


C’est une évidence mais on va quand même enfoncer le clou, votre bio n’est pas destinée à être la chronique de votre propre disque. Trouver les mots justes, le bon adjectif, c’est un exercice compliqué et l’on n’a pas toujours un copain journaliste chez Rock & Guitares pour faire le sale boulot. Et quelque part, c’est peut-être tant mieux. Ça vous évitera l’emploi de mots bannis par la convention de Genève depuis la fin du trip-hop : les « batteries virevoltantes », la « symphonie boisée » et autres « mélodies organiques qui touchent l’auditeur en plein cœur », on les oublie. En cas de succès de votre groupe, nombreux seront les journalistes à écrire n’importe quoi ; profitez donc de ce dernier moment d’anonymat pour faire simple et didactique. Et en cas de panne sèche devant la feuille blanche, n’hésitez pas à aller lire d’autres bios de groupes pour vous inspirer. Écrire une bio ? Hey, comme dirait Chris Martin, personne n’a jamais dit que c’était facile

À propos de l'auteur :
Bester

Fondateur et rédacteur en chef du site et magazine Gonzaï, Thomas (aka Bester) dirige également Jack, la plateforme musicale de Canal Plus. Il est l’un des membres historiques du jury du Prix Société Pernod Ricard France Live Music et écrit régulièrement sur le site pour dispenser des bons (et quelquefois mauvais) conseils aux groupes qui voudraient faire carrière.

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