Les bons conseils de Bester pour briller dans l’industrie du disque

Tuto

Qu’on soit musicien indie ou professionnel, star en devenir ou rebelle anti-système, la rentrée est toujours le moment idéal pour prendre de bonnes résolutions. Voici donc dix commandements à respecter (à peu près) à la lettre pour vous assurer célébrité, chance et retour de l’être aimé (le fan). On vous laisse six mois pour repartir à 0 et on relève les copies.


ARRÊTEZ D’ENVOYER DES CD


La légende raconte qu’au milieu des années 90 la musique générait des milliards de dollars de bénéfice, et qu’il était alors courant pour un groupe non signé de saturer les boites aux lettres de médias et de labels avec ce truc qui s’appelait LE CD GRAVÉ. Spoiler : ce monde n’existe plus, et rien n’est plus pénible pour un journaliste ou un directeur artistique que de recevoir cet objet en plastique sans âme sur lequel vous avez gravé le nom de votre album au marqueur (dans 88% des cas ça bave et c’est dégueulasse). Optez plutôt pour un lien d’écoute privé Soundcloud ou Bandcamp (voire même un simple Wetransfer) afin de convaincre la planète pop qu’elle doit s’arrêter de tourner pour vous. Et puisqu’on parle de la planète, pitié, pensez à elle : réfléchissez bien avant de graver ce CD.
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DEVENEZ UN PRO DES EMAILS


Okay, a priori cette consigne ne vous fait pas sauter au plafond et vous vous imaginez déjà avec un casque de centre d’appel délocalisé en Tunisie. S’il est vrai qu’envoyer des emails n’a rien de sexy quand on se rêve comme le nouveau Lemmy, il vous faudra bien vous rendre à l’évidence : c’est l’outil du 21ième siècle et la règle consiste à en envoyer… le moins possible. Commencez par supprimer cette adresse stupide que vous avez créé pour rigoler (guy.ligili@hotmail.com, Star_Fuckers_666@gmail.com, ce genre) et trouvez un nom capable d’imposer le respect. Ensuite, il est vivement conseillé de ne pas inonder l’Internet de mails en copié-collé, mais plutôt de méticuleusement sélectionner les professionnels (tourneurs, labels, SMAC…) avec qui vous souhaitez échanger. Deux avantages : gagner du temps (après tout votre boulot c’est de faire de la musique) et éviter de vous griller avec la moitié du milieu parce que le mail type écrit tard le soir en rentrant de tournée était rempli de fautes ou avec le mauvais lien vers votre clip. Avec la signature « musicalement » et l’envoi du mailing avec tous les destinataires en copie apparente, le mail de 50 lignes écrit à l’arrache avec de mauvais copié-collé devrait certainement vous couter votre place sur la prochaine saison de la Nouvelle Star (je déconne, c’est fini).

 

Centre d'appel


DITES OUI À TOUT …


Quand on veut se faire connaître, (presque) tout est bon à prendre. Ne faites pas la fine bouche sur les dates mal payées ni sur la musique de pub qu’on vous propose pour cette marque de tampons hygiéniques (bon là, faudra prendre un pseudo par contre), l’important pour un groupe encore invisible, c’est d’exister. La durée de vie d’un groupe étant par définition courte (de 3 à 7 ans selon un récent sondage réalisé par l’institut MDR), autant mettre toutes les chances de votre côté en jouant partout en France, même aux pires conditions. Le jour où vous remplirez des Zenith comme Calogero avec la moitié des tracks en play-back, il sera peut-être temps de vous poser des questions, mais en attendant…

YESS


… MAIS SACHEZ DIRE NON


Comme Jean Pierre Raffarin, le Ringo Starr de la politique, l’a dit : « The yes needs the no to win against the no ». Bon, c’est vrai, ça ne veut rien dire. Mais l’ancien Premier Ministre avait au moins raison sur un truc : savoir dire non est aussi parfois un luxe. La date qu’on vous propose dans ce rade pourri à 600 km de chez vous en échange d’une bouteille d’eau calcaire, c’est non. Ce tremplin truqué où l’on gagne grâce au vote à main levée de ses fans (qui ont payé 25 € l’entrée), c’est non aussi. Quant à la signature sur ce prestigieux label qui vous propose de presser votre vinyle en Russie à 3000 exemplaires pour se faire de l’argent sur votre dos, c’est niet. Développer sa visibilité en tant que groupe émergent, ça veut non seulement dire savoir refuser la 55ième date en six mois dans sa ville d’origine, mais aussi sélectionner drastiquement ses participations aux Prix destinés à révéler les talents de demain. Si tu connais Ricard S.A. Live Music, on ne te fera pas l’affront de réexpliquer pourquoi c’est l’un des meilleurs. Toi-même tu sais.

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FAITES LE MÉNAGE


Non, ce n’est pas une blague sexiste. Il est ici question de nettoyer les tâches sur votre costume de super héro. En gros : puisque jusqu’à preuve du contraire vous ne pouvez compter que sur vous, il faut bien effacer les casseroles disponibles sur l’Internet (exemple : ce live catastrophique au Salon de l’Huitre filmé à l’iPhone par tata qui a la maladie de Parkinson) ou tout autre preuve compromettante que, comme Shy’m, vous ne savez pas voler. Faire le ménage, c’est aussi faire le point avec votre groupe et licencier le batteur parce qu’il est à la fois fan de l’OM et de Lars Ulrich.


DIVERSIFIEZ-VOUS HORIZONTALEMENT


A la fac, les cours de market nous expliquaient que la diversification horizontale « consiste à introduire de nouvelles activités susceptibles de satisfaire les mêmes segments de clientèle, même si la technologie utilisée est différente ». Bon, on est bien d’accord qu’on a tous séché ces cours pour zoner sur la pelouse, mais maintenant que vous devez gérer votre com’ tout seul, il serait peut-être temps de mettre ça en pratique. Monde digital oblige, votre diversification horizontale ne consistera pas à avoir le maximum de groupies, mais à user et abuser de tous les réseaux sociaux à disposition pour devenir populaire auprès des communautés de fans, et qu’on ne touche pas forcément de la même manière selon qu’on est sur Instagram ou Snapchat. Pour résumer, faites comme Yamaha qui commercialise à la fois des motos, des pianos et des guitares. Oh, ça tombe bien, c’est justement l’un des partenaires du Prix Ricard S.A. Live Music (#PlacementProduit)


S’INFORMER SUR L’INDUSTRIE


Etre acteur de votre propre destinée de groupe qui va tout emporter (un peu comme l’Ouragan de Stéphanie de Monaco), c’est aussi savoir observer le monde qui vous entoure. Quel groupe cartonne actuellement ? Pourquoi ont-ils « la carte » auprès des médias et pas vous ? Et pourquoi leur clip cartonne quand le vôtre stagne à 53 vues ? Autant d’éléments de réponse qui devraient vous aider à faire tout l’inverse (pour vous démarquer et assumer votre position d’outsider) ou faire pareil (parce que vous en avez marre de manger des pâtes). A ce titre, la liste des membres du jury du Prix Ricard S.A Live Music sera bientôt accessible, et disponible sur demande pour vos tentatives de corruption (Spoiler #2 : Sepp Blater ne fait pas partie du jury)


DEVENEZ UN BON « STALKER »


Si vous avez manqué les 20 dernières années d’Internet, un « stalker » peut se traduire par « rodeur » ou « traqueur » ; et le terme définit toute personne capable de grappiller des infos sur telle ou telle personne grâce à Google et Facebook. Lister les médias et journalistes influents, comprendre leurs goûts et leurs failles et tirer sur leurs cordes sensibles ; voilà votre boulot pour le prochain semestre. Thanks to the Internet, vous avez désormais la chance d’être la NSA à vous tout seul. Mais que cela ne vous force pas, comme Jean-Michel Jarre, à faire un featuring avec Edward Snowden…


CHANGEZ LE NOM DU GROUPE


Arrivé au point 9, vous avez tout essayé, tout tenté, mais rien ne fonctionne. Peut-être faut-il simplement revoir ce truc essentiel qu’est l’identité de votre groupe. Peut-être que s’appeler The Nabila’s ou Lea Sex Doux n’était pas une bonne idée. Pour repartir de 0 avec une nouvelle carte d’identité musicale, pas besoin de perdre trois jours à la préfecture. Et en cas d’hésitation, le site Band Name Maker devrait vous aider à trouver un blaze meilleur que celui de Kendji Girac (comment ça c’est son vrai nom ?)


LICENCIEZ LE MANAGER


Si aucun des conseils précédents n’a eu les effets escomptés, il faut vous rendre à l’évidence et prendre la décision qui s’impose comme à chaque fois qu’une équipe de foot perd une finale : licencier le manager. Votre entraineur à vous se doit d’être – dès que possible – un professionnel, et pas le cousin du coin qui connaît vaguement le frère du directeur artistique de Lose Records. Le Cardinal de Retz disait que « choisir c’est renoncer ». + 1 pour le Cardinal. Pour éviter de renoncer, soyez impitoyable et dites au revoir à celui qui vous a fait perdre 3 ans à cause de mauvais choix. Aux dernières nouvelles, Aymé Jacquet est plutôt libre ces derniers temps…

aymé jaquet